Communiqué par Richard Mebaoudj de l’association « Non au Gratte-Ciel de Toulouse »
L’accord donné par la Mairie actuelle au permis de construire de la Tour Occitanie, projet de gratte-ciel d’une hauteur de 150 mètres occupant la parcelle de l’ancien tri postal voisin du bâtiment principal de la gare Matabiau, coincé entre les voies SNCF et le Canal du Midi, fait maintenant l’objet d’un recours contentieux en annulation.
Il vient d’être déposé aujourd’hui, 12 décembre 2019, par 4 organisations apolitiques [1] et 5 riverains directement impactés par cet édifice démesuré.
Il fait naturellement suite au recours gracieux émis par les mêmes le 20 septembre, et rejeté par le Maire de Toulouse par un écrit en date du 15 octobre.
Le recours contentieux que nous déposons ce jour démontre que l’étude d’impact de la Tour Occitanie effectuée dans le cadre de l’évaluation environnementale globale réalisée à l’occasion de l’Enquête Publique du futur quartier « Grand Matabiau – quais d’Oc » (anciennement TESO), si tant est qu’elle soit établie en conformité avec les règles applicables, souffre de graves lacunes. Nous allons maintenant les évoquer.
Globalement, au vu de ce résultat, on peut dénoncer une concertation insuffisante pour un projet pourtant décrit comme emblématique de Toulouse. Faut-il rappeler que l’existence de ce gratte-ciel a été révélée au MIPIM de Cannes avant d’être présentée aux Toulousains et que les premières phases de consultation sur l’évolution du PDU et sur TESO ne font pas mention du gratte-ciel ?
Comme le note la commission d’enquête elle-même, les éléments du dossier de consultation, et notamment cette étude d’impact, sont à la fois confus et incomplets. Et ceux-ci rendent par suite difficile le jugement par les toulousains des impacts et l’appréhension des enjeux
Une volonté forte de la municipalité d’imposer ce projet a conduit à éluder de nombreux points majeurs pour déterminer le choix de construire ce projet pharaonique.
• L’absence de justifications, au sens du code de l’environnement, de la proposition de l’édification d’un gratte-ciel à l’emplacement retenu (parcelle de l’ancien tri postal) ;
Cette analyse est expressément demandée par le code de l’environnement, afin de justifier le projet en présentant une comparaison sérieuse de la solution retenue avec des solutions de substitution raisonnables ;
En effet, l’intérêt d’édifier un bâtiment de cette ampleur doit se mesurer au regard des désagréments ou des risques – environnementaux, techniques ou économiques, etc. – qu’il fait indiscutablement supporter à l’environnement et aux populations ;
• Une prise en compte minimisée des impacts du projet sur le patrimoine ;
Une vigilance particulière doit être exercée, que ce soit vis-à-vis de l’insertion paysagère du gratte-ciel à proximité du bâtiment principal de la gare, classé, ou bien vis-à-vis des orientations prévues dans le « Plan Canal » ou bien encore vis-à-vis de la candidature de la ville de Toulouse à son inscription au titre de l’UNESCO ;
Une légèreté évidente sur la prise en compte de la santé des toulousains et des risques majeurs
• Une prise en compte trop légère de la vulnérabilité du projet à des risques d’accident ou de catastrophe majeure ;
Plutôt que minimiser tout problème à ce niveau, il faut montrer une extrême résistance au risque créé par le transport de matières dangereuses à proximité immédiate d’une zone sur-densifiée (le gratte-ciel), ou celui résultant d’un phénomène hydraulique d’origine plus lointaine (répercussion à distance d’une rupture de barrage par exemple) ;
• Le manque d’analyse sérieuse quant à la maitrise par l’autorité compétente de l’augmentation locale du trafic automobile ;
Que ce soit en phase chantier ou en phase exploitation, le trafic automobile réagit directement sur le niveau de pollution de l’air, et son impact est direct sur la santé des habitants, particulièrement critique dans ce secteur urbain central ; l’impact de l’éventuel gratte-ciel sur celui-ci doit être sérieusement étudié.
• L’absence d’évaluation des impacts du gratte-ciel sur le régime hydraulique souterrain, et l’estimation du risque afférent ;
Il est noté par le promoteur des difficultés liées à la construction du bâtiment dans cette zone dite « singulière » dont les variations sont incomplètement maîtrisées (nécessitant pour le promoteur au suivi dit « piézométrique du sol sur une longue période »).
Un projet qui, dans sa réalisation et son fonctionnement, aura un impact négatif et finalement important sur le climat
• L’absence de définition explicite des matériaux de construction finalement proposés ;
Au terme de l’enquête publique, il est exigé des matériaux structuraux à plus faible contenu énergétique que ceux initialement prévus, et leur définition est encore à produire par le promoteur ;
Les prescriptions relatives aux éléments de façade appellent la fourniture d’éprouvettes (non spécifiées) qui n’ont pas été encore réalisées et analysées ;
L’ensemble de ces définitions réagissent d’ailleurs directement sur l’actualité de la construction soumise à étude d’impact qui doit être intégralement mise à niveau ;
• Les incertitudes sur les éléments de consommation énergétique du bâtiment ;
Devant l’absence d’éléments de définition à cet égard, on note une certaine confusion quant à la mise en place d’une marge de tolérance (20%) réservée aux évolutions éventuelles plutôt qu’un engagement ferme à tenir le in fine le bilan minimum (RT2012 – 20%) présenté ;
On notera particulièrement ici l’absence de dispositif EnR (énergie renouvelable) et la violation des dispositions du PLUi-H et communes liées à la sobriété énergétique des constructions ;
• De sérieuses questions sur la faisabilité et la pérennité des rubans végétaux ;
La qualité ainsi que la quantité de substrats et besoins en eau (potable) nécessaires à leur subsistance sont encore à préciser ;
Une discussion sérieuse sur leur vulnérabilité est encore à mener, que ce soit vis-à-vis des phénomènes météorologiques (vents principalement) ou des conditions climatiques (réchauffement).
Pour chacun de ces manquements, et en préalable de nos réactions circonstanciées, notre document de recours explicite les rappels avisés et anticipés de l’Autorité Environnementale sur ces différents sujets d’importance (en particulier dans son avis du 5 décembre 2018), ainsi que les réponses correspondantes du promoteur extraites des documents de l’Enquête Publique et rapportées par la Commission d’Enquête.
Ainsi, le lecteur pourra en apprécier la qualité et en tirer – avec nous – la conclusion qui s’impose, à savoir l’annulation pure et simple du permis.
[1] Association « Non au Gratte-Ciel de Toulouse », Association « Les Amis de la Terre Midi Pyrénées / ATMP », Association « Droit Au Logement / DAL 31 », Association « France Nature Environnement Midi Pyrénées / FNE MP »