Animée par Marie Renault
Co-organisée par les Amis du Monde Diplomatique, , EELV, les ATMP
Fondements théoriques
Les luttes féministes peuvent-elles avoir des rapports spécifiques avec la défense de la Nature ? C’est une féministe française, Françoise d’Eaubonne, qui pour la première fois en 1972 contracte écologie et féminisme en un mot : l’éco-féminisme. Elle considère que l’exploitation de la Terre et l’oppression des femmes sont deux phénomènes imbriqués l’un dans l’autre parce qu’ils ont pour origine le patriarcat : ce système de distinction entre hommes et femmes qui induit un rapport de domination des premiers sur les secondes, et attribue aux femmes les fonctions corporelles de la sexualité et de la procréation. Les aspects du « féminin » sont d’une part associés à la Nature, sur laquelle les hommes pensent avoir le contrôle, et assignés d’autre part à des rôles subalternes dans l’échelle de reconnaissance sociale. Pour Françoise d’Eaubonne, la double emprise des hommes sur les femmes et sur la Nature se vérifie par le constat de la surproduction agricole et de la sur-reproduction de l’espèce humaine. En reprenant le contrôle de leurs corps et en s’émancipant des hiérarchies, les femmes pourraient alors mettre fin à la domination masculine en même temps qu’à l’exploitation sans réserve des ressources.
Une question de justice environnementale
D’un point de vue socio-économique, l’approche éco-féministe consiste à questionner notre mode de vie depuis ses conséquences sur notre santé et celle de nos enfants, et jusqu’à la qualité des sols et les équilibres écologiques en général. Le réchauffement climatique a en effet des impacts socio-économiques dont les femmes et les enfants sont les premières victimes. Dans la majorité des pays les femmes sont défavorisées quant à l’accès aux ressources financières et à la propriété. Or l’appropriation et l’exploitation des terres par le capitalisme les privent de leurs moyens directs de subsistance et de leur autonomie alimentaire : leurs opportunités d’intégration au monde moderne, si elles existent, se réduisent à des métiers secondaires et précaires.
Par ailleurs, les catastrophes climatiques et la diminution des productions favorisent les conflits sociaux et les déplacements de populations ; autant de contextes qui augmentent le risque pour les femmes d’être victimes de violences physiques, de viols, d’abus.
Développements philosophiques
Au niveau philosophique, l’éco-féminisme s’est développé dans le monde anglo-saxon depuis la fin des années 70 pour fournir une critique profonde du discours occidental sur l’Homme et la Nature. Il redéfinit les contours de notre humanité à partir de qualités ordinairement attribuées aux femmes et donc dévaluées, puisque synonymes de fragilité, de passivité.
Pour les théoriciennes de l’éco-féminisme, notre vulnérabilité et notre dépendance à l’égard de notre environnement est une condition commune au règne du vivant, dont nous faisons intrinsèquement partie. Depuis ce point de vue, être sensible à la souffrance, à l’extinction des espèces, à la destruction des écosystèmes, ne devrait pas nous affaiblir. Au contraire, en nous permettant de ressentir combien les dommages faits à la Terre sont des dommages que nous nous infligeons à nous-mêmes, physiquement et émotionnellement, cette sensibilité est aussi une arme pour développer de nouvelles visions politiques et économiques qui rendraient prioritaires bien- être et respect dans nos interactions avec le milieu. À l’encontre de notre tradition philosophique, l’éco-féminisme met l’accent sur l’importance des liens entre équilibres écologiques et santé physique et morale, liens pour accorder nos vies avec le reste du vivant.
A 20h30, salle Castelbou, voir la localisation
Entrée libre